Accueil

Des ingrédients sur la sellette … dans les crèmes solaires aussi !

15 Jul 2017 Crèmes solaires

Par Marie-France Corre, ancienne responsable des essais à UFC-Que Choisir, aujourd'hui consultante en consommation et développement

La polémique dure depuis plusieurs années déjà : certains ingrédients courants des cosmétiques seraient nocifs pour la santé. Parmi eux : les éthers de glycol (dont le conservateur phénoxyéthanol), les parabens, une famille de conservateurs très efficaces, ou certains filtres solaires chimiques - tout particulièrement le 4-MBC - censés posséder des effets perturbateurs endocriniens.

Des ingrédients sur la sellette … dans les crèmes solaires aussi !

Crédit photo : Skin Cancer Foundaition

Des études reconnues le prouvent : à forte dose, tous ces ingrédients exercent des effets indésirables, mais la communauté scientifique ne s’accorde pas sur la réalité des effets à doses plus faibles, via des cosmétiques par exemple. Une controverse découverte en février 2005 par le public français lors d'un reportage de l’émission Envoyé spécial. La question avait beau avoir déjà été soulevée par le passé, notamment dans le best-seller de Rita Stiens, "La vérité sur les cosmétiques" [1], les révélations de ce reportage ont fait l’effet d’une bombe. Depuis, de nombreux consommateurs, méfiants vis-à-vis des cosmétiques conventionnels, se sont tournés vers les cosmétiques naturels ou bio, dont les ventes augmentent de plus de 40% chaque année. Les autorités sanitaires, comme l’Afssaps en France, se veulent quant à elle rassurantes et estiment, revues bibliographiques et études à l’appui, qu’il n’y a pas lieu de remettre en cause l’autorisation d’utilisation de ces ingrédients.

Le débat n’est pas limité à l'Hexagone : aux Etats-Unis, sur le site Skin Deep de l'association Environmental Working Group, les consommateurs peuvent trouver des informations détaillées sur les risques des cosmétiques pour la santé. Consultable gratuitement, une impressionnante base de données recense plusieurs milliers d’ingrédients et évalue plus de 41 000 produits cosmétiques. En septembre 2008, l'EWG a publié la Teens Cosmetic Survey, une étude spécifiquement consacrée aux adolescentes. Les résultats ont montré que 16 substances chimiques issues de 4 familles différentes (phtalates, triclosan, parabens et muscs) ont été retrouvées dans les échantillons de sang et d’urine des 20 adolescentes, âgées de 14 à 19 ans, qui avaient participé à l’étude. Inquiet, l'EWG pointe le lien entre ces substances et des risques potentiels sur la santé allant jusqu’au cancer.

En l’absence de consensus scientifique, le marché semble avoir tranché. Soit par doute sur la sécurité de ces ingrédients, soit pour répondre à la demande, plusieurs marques affichent des pourcentages nuls en paraben et autres phénoxyéthanol. Les cosmétiques bio labellisés (Ecocert, Cosmebio, BDIH, Nature & Progrès) s'interdisent quant à eux l’utilisation de ces ingrédients de synthèse.

Avec une composition similaire à celle d'un cosmétique classique, filtres chimiques et écrans minéraux en plus, les produits solaires n’échappent pas à ce débat. Les produits sans parabens, sans éthers de glycol voire naturels ou bio ont rejoint les rayons des pharmacies, parfumeries et grandes surfaces. La question n’en est pas moins pertinente pour les "solaires" : plusieurs filtres chimiques sont considérés comme des perturbateurs endocriniens et d'après une étude japonaise de 2006, les ultra-violets pourraient favoriser certains mécanismes toxiques spécifiques .Pour les experts, il reste désormais à savoir s’il est possible de formuler, sans filtres chimiques, des produits solaires efficaces contre les coups de soleil et protégeant des UV-A.



1.Leduc.S Editions

2.Methylparaben potentiates UV-induced damage of skin keratinocytes, Osamu Handaa, Satoshi Kokura, Satoko Adachi, Tomohisa Takagia, Yuji Naito, Toru Tanigawae, Norimasa Yoshidad and Toshikazu Yoshikawa, Toxicology, Volume 227, Issues 1-2, 3 October 2006, Pages 62-72

Voir aussi