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Le soleil au travail

santé au travail 01 Aug 2025 Santé au travail

Les risques du soleil en milieu professionnel : un enjeu de santé au travail et de santé publique.

L’exposition importante aux rayonnements ultraviolets (UV) par les travailleurs exerçant à l’extérieur concerne environ 10% de la population active. En Europe, on estime que 14,5 millions de travailleurs sont exposés pendant au moins 75 % de leur temps de travail.

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L’EU-OSHA (Agence européenne pour la sécurité et la santé au travail) estime que le rayonnement solaire est le 1er agent cancérogène au travail. Dans plusieurs pays européens, comme l’Allemagne ou la Suisse, le cancer cutané de type épidermoïde est déjà reconnu comme maladie professionnelle. En France, en revanche, les risques demeurent largement sous-estimés : ni les cancers de la peau ni la cataracte n’ont encore obtenu ce statut, et les actions de prévention ou de promotion de la santé restent trop limitées (1),(2)

Cette sous-évaluation est d’autant plus préoccupante que les secteurs et métiers concernés sont nombreux et variés. On pense en premier lieu au BTP, à l’agriculture ou au paysagisme, mais aussi aux métiers de la mer (pêcheurs, ostréiculteurs, sauveteurs, dockers…) ou de la montagne, où la réverbération du rayonnement accentue les risques. S’ajoutent également les professionnels du sport et de l’animation en extérieur (enseignants d’EPS, moniteurs, animateurs de colonies ou de villages de vacances), mais aussi les transports, les militaires, les pompiers et les policiers (2).


Sommaire :



Changement climatique et exposition aux UV des travailleurs

Selon une étude récente du Programme des Nations Unis pour l’environnement (PNUE), des liens existent entre le rayonnement solaire UV et le changement climatique. Les experts redoutent que dans les prochaines années, en raison du réchauffement climatique, une moindre nébulosité soit observée, augmentant ainsi les doses d’UV reçues au sol (3).

On peut également s’interroger sur les comportements que les travailleurs adopteront face à ces températures en hausse : auront-ils tendance à se découvrir ou au contraire porter des vêtements et chercher des espaces ombragés ? Des questions se poseront, bien sûr, aussi aux employeurs. Quelles mesures techniques et organisationnelles (planification des activités, installation d’abris, mise à disposition d’équipements de protection individuelle solaires…) mettre en place ? En termes de santé au travail, cette problématique climatique sera de plus en plus prégnante.

Dans son avis d’avril 2023 « Travail et santé-environnement », le Conseil Économique, Social et Environnemental (CESE) renforce ce constat en soulignant que « les secteurs de la construction et de l’agriculture présentent des risques très importants », exposant les salariés à la fois à des températures élevées et au rayonnement ultraviolet. Il appelle à renforcer la prévention de ces risques en les intégrant davantage dans le dialogue social et les politiques de santé au travail (4).


Les risques pour la santé liés aux expositions solaires professionnelles

Les effets sur la santé (5) en lien avec les expositions professionnelles au rayonnement ultraviolet solaire, ne sont pas différents en nature des effets liés aux expositions récréatives. Cependant, pour beaucoup de travailleurs, l’exposition est répétée. Et cumulées, les doses reçues peuvent s’avérer beaucoup plus importantes chez les travailleurs en extérieur.

Sur la peau :

A court terme, dès le printemps dans les régions tempérées, cela peut être des coups de soleil voire des brûlures graves et des allergies. A long terme, le vieillissement cutané est accéléré et surtout, des cancers de la peau surviennent, en particulier ceux liés aux expositions chroniques comme les carcinomes. Presque toutes celles et ceux, qui ont la peau claire et qui travaillent dehors, en développeront un au cours de leur vie (6).

Mais les risques sont également présents pour les peaux mates et foncées, même si leur capacité à réparer les lésions sur l’ADN des cellules, ce qu’on appelle en langage courant « le capital solaire », est bien plus importante. Pour tous, lorsque ce capital est épuisé, les erreurs de réparation se multiplient et conduisent à des cancers cutanés, dont certains s’avèreront mortels.

L’OMS et l’OIT ont publié en 2023 un rapport conjoint dont les conclusions sont nettes : Au niveau mondial, le cancer cutané non mélanome (NMSC) tue chaque année 65.000 personnes avec une imputabilité à un métier exercé à l’extérieur pour près de 20.000 d’entre eux et 500.000 années de vies perdues pour ces derniers (7).

En Allemagne, où le carcinome épidermoïde cutané est reconnu comme maladie professionnelle depuis plusieurs années, ce sont 4000 à 6000 cas d’association avec un métier de plein air qui sont recensés chaque année. C’est même la maladie professionnelle la plus répandue dans le secteur du bâtiment où les partenaires sociaux ont signé une convention pour améliorer la protection des ouvriers (8). En France, le carcinome épidermoïde cutané professionnel souffre d’un manque de visibilité avec seulement quelques cas identifiés chaque année.

À noter toutefois que certains secteurs d’activité, comme les policiers, pompiers ou militaires, peuvent penser être protégés par leur uniforme. Pourtant, le visage, le dos des mains et les avant‑bras restent largement exposés, et c’est précisément sur ces zones que se développent l’essentiel des cancers cutanés épidermoïdes d’origine professionnelle. D’où la nécessité d’une protection solaire optimale, en particulier sur les parties découvertes.

Plus d’informations sur les dommages cutanés.

Sur les yeux :

Les rayons UV favorisent aussi la survenue de maladies oculaires. L’OMS estime que 20 % des cas de cataractes (opacification du cristallin) sont en lien avec l’exposition aux UV. Pour un pays comme la France, ce sont près de 200.000 interventions par an que l’on peut attribuer aux expositions solaires. Il est important de noter que : -Tous les individus sont concernés quelle que soit la couleur de leurs yeux ou de leur peau.

  • L’effet des UV est cumulatif. Sans protection, plus les individus vivent et travaillent à l’extérieur et près des tropiques, plus précocement survient la cataracte.

L’exposition aux UV semble être aussi un des facteurs de risques la dégénérescence maculaire liée à l’âge (DMLA), une cause majeure de déficience visuelle et même la première cause de cécité dans les pays développés. Cette exposition de l'œil au rayonnement UV peut aussi être associée à d’autres troubles, notamment de la conjonctive, de la cornée (ophtalmie), des lésions des paupières(9)

Plus d’informations sur les dommages oculaires.

Ces risques cutanés et oculaires peuvent également être majorés par la co-exposition à certains produits chimiques ou par la prise de médicaments (photosensibilisants). Voir l’article sur ce sujet.


Les trois messages clés

D'avril à septembre entre 12h et 16h, restez à l'ombre dès que possible

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Vêtements et lunettes de soleil anti-UV, crème solaire FPS 50

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Protège-nuque ou chapeau à large bords image2

Pour plus de recommandations, par secteurs d’activité, consultez la page dédiée


Réglementation actuelle et "future"...

Depuis 2018, le nouveau règlement européen (UE) 2016/425 (abrogeant la directive 89/686/CEE) exige que les équipements de protection individuelle (EPI) soient en mesure de protéger la peau des travailleurs du rayonnement UV.

Votée le 2 aout 2021, la Loi Santé Travail n° 2021-1018 pour « renforcer la prévention en santé au travail », devrait permettre une avancée majeure en termes de santé et de sécurité au travail. Elle prévoit notamment :

  • De renforcer la prévention en matière de santé au travail, décloisonner Santé publique et santé au travail
  • Le passeport prévention
  • La surveillance post-exposition

Dans son avis du 29 mai 2020, le Haut Conseil de la Santé Publique (HCSP) recommande des actions ciblées face aux expositions solaires professionnelles : mesures collectives et individuelles, ainsi qu’une surveillance sanitaire adaptée. Plus d’infos…

Enfin, en mai 2025, le décret n° 2025‑482 marque une étape décisive dans la protection des travailleurs contre les risques solaires. Ce décret impose aux employeurs de prendre des mesures concrètes face aux risques liés à la chaleur et aux rayonnements solaires, comme l’aménagement des horaires de travail, la fourniture d’équipements de protection adaptés et la mise en place de dispositifs techniques (ventilation, brumisation, protections solaires). Ces mesures doivent être appliquées dès qu'une vigilance jaune, orange ou rouge est émise par Météo-France, assurant ainsi une protection renforcée pour les travailleurs exposés. Ce texte s’inscrit dans la continuité des précédentes législations et constitue un pas important vers la sécurisation des conditions de travail face aux effets du soleil.

Ces textes traduisent une prise de conscience progressive et une obligation désormais explicite pour les employeurs de protéger leurs salariés contre les effets des rayonnements UV.

L’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses) a été saisie en 2025 et devrait émettre un avis sur ce point avant la fin de l’année.

Pour plus d’informations sur la loi en France et ailleurs dans le monde…


Le programme Soleil et Santé au travail de La Sécurité Solaire

En 2020, lors de sa redésignation en tant que centre collaborateur de l’OMS, La Sécurité Solaire a reçu mission de travailler sur les expositions solaires en milieu professionnel. Avec le soutien des Entreprises contre le cancer et du comité des Hauts de Seine de la Ligue contre le cancer , La Sécurité Solaire a lancé le programme Soleil et Santé au travail (2022-2026) pour :

  • Sensibiliser, informer, former pour limiter les effets néfastes des expositions solaires des travailleurs
  • Promouvoir la protection solaire par des mesures individuelles et collectives
  • Promouvoir la détection précoce des cancers de la peau, cataractes et DMLA

Le programme associe études scientifiques, actions de terrain, outils pédagogiques et médiation entre acteurs.

Consultez les pages suivantes pour :

Voir les actions terrain et outils pédagogiques disponibles...


Bibliographie

1.Modenese, A., L. Korpinen, and F. Gobba, Solar Radiation Exposure and Outdoor Work: An Underestimated Occupational Risk. Int J Environ Res Public Health, 2018. 15(10)

2. European Agency for Safety and Health at Work. New and emerging risks in occupational safety and health. 2009.

3. Neale RE et al. Environmental effects of stratospheric ozone depletion, UV radiation, and interactions with climate change: UNEP Environmental Effects Assessment Panel, Update 2020. Photochem Photobiol Sci. 2021 Jan 1;20(1):1–67.

4. Conseil économique, social et environnemental (CESE). Travail et santé-environnement : quels défis à relever face aux dérèglements climatiques ? Avis et rapport, avril 2023.

5. Cesarini J.P. Rayonnement ultraviolet et santé. Radioprotection. 2007. p379-392.

6. Trakatelli, M., et al., Skin cancer risk in outdoor workers: a European multicenter case-control study. J Eur Acad Dermatol Venereol, 2016. 30 Suppl 3: p. 5-11.

7. Global, regional and national burdens of non-melanoma skin cancer attributable to occupational exposure to solar ultraviolet radiation for 183 countries, 2000–2019: WHO/ILO Joint Estimates Environment International Volume 181, Nov.23, 108226

8. UV-irradiation-induced skin cancer as a new occupational disease Hautarzt. 2015;66(3):154-9. doi: 10.1007/s00105-015-3587-z.

9. Delcourt C, Cougnard-Grégoire A, et al. Lifetime exposure to ambient ultraviolet radiation and the risk for cataract extraction and age-related macular degeneration: the Alienor Study. Invest Ophthalmol Vis Sci. 2014 Oct 21;55(11):7619–27.

Voir aussi

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